Lancé il y a bientôt deux ans par le journaliste et documentariste David Dufresne, le site « Allô place Beauvau » répertorie 961 signalements de violences policières, principalement dans les manifestations. On note ainsi 4 morts, 344 blessures à la tête, 81 blessures aux membres supérieurs, 29 éborgnés et 5 mains arrachées. S’y ajoute la criminalisation des militants par une lourde répression judiciaire, comme le confirme le récent rapport d’Amnesty International : « Arrêté-e-s pour avoir manifesté ».
La France se distingue tristement en Europe et cette situation a fait l’objet de nombreuses alertes émanant du Défenseur des droits, du Haut-Commissariat des Nations-Unies aux Droits de l’Homme, d’organisations de journalistes, du Conseil de l’Europe…
Le nouveau schéma national du maintien de l’ordre (SNMO), présenté le 17 septembre, confirme la volonté du ministère de l’Intérieur de prolonger une doctrine d’escalade de la violence. Très loin des recommandations qui prônent l’apaisement des tensions et le rétablissement de la confiance entre la police et les citoyens, le SNMO entérine au contraire :
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le maintien des armes mutilantes et dangereuses tels que le LBD40 et les grenades de désencerclement,
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l’utilisation de technique de la « nasse », pour encercler les manifestants.
Cette stratégie offensive considérant le manifestant comme un potentiel fauteur de troubles à l’ordre public porte atteinte indéniablement à la liberté fondamentale de manifester !
De plus, de manière particulièrement grave dans une démocratie, cette doctrine met en danger la liberté d’informer et donc la liberté de la presse. En effet, en mentionnant dans le SNMO les journalistes « titulaires d’une carte de presse, accrédités auprès des autorités », le gouvernement opère un tri inadmissible parmi les journalistes qui couvrent les manifestations.
Pire encore, les journalistes se voient associés, sans distinction, aux manifestants, puisqu’il leur est rappelé qu’ils commettraient un délit, en cas de non-dispersion après des sommations. Ce qui revient à entraver l’exercice de leur mission d’information, au moment même où leur présence est la plus utile et indispensable.
Ces attaques sont graves, elles dénotent d’une dérive inquiétante pour un Etat de droit, qui doit au contraire protéger et garantir ces libertés fondamentales.
C’est pourquoi la CGT et le Syndicat national des journalistes CGT (SNJ-CGT) ont déposé un recours en urgence devant le Conseil d’Etat. Lors de l’audience prévue le 16 octobre 2020, ce dernier examinera également le recours déposé par le SNJ et la Ligue des Droits de l’Homme (LDH).
Montreuil, le 5 octobre 2020